Le syndrome de l’imposteur : Dre Chika Stacy Oriuwa | AMC

Seule étudiante noire de sa promotion dans le programme de médecine de l’Université de Toronto, elle a lutté contre le syndrome de l’imposteur et l’anxiété. Voici comment elle a trouvé sa voix.

Cette histoire a été enregistrée à l’été 2019.

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Je m’appelle Chika – mais on m’appelle souvent Chika Stacy –, et mon nom de famille, c’est Oriuwa. Je suis en troisième année de médecine à l’Université de Toronto. Je devrais plutôt dire en quatrième année, comme je vais bientôt la commencer. Je fais aussi une maîtrise en direction et innovation de systèmes.

Quand je suis arrivée à l’école de médecine, j’étais nerveuse – comme tous les nouveaux étudiants du domaine. J’étais surtout nerveuse parce que je me demandais si, dans ma cohorte, j’allais trouver de la diversité et des personnes qui partagent ma culture et mon identité. En fait, j’avais peur d’être la seule étudiante noire, comme pendant mes études de premier cycle à l’Université McMaster.

À peu près une semaine avant la semaine d’intégration, l’association des étudiants en médecine noirs de l’Université de Toronto a organisé un repas pour accueillir les nouveaux. J’étais la seule de mon année. On s’est dit qu’il y en avait sûrement d’autres, mais qu’ils n’étaient pas là. Mais non. À la cérémonie de remise du stéthoscope, j’ai compris que j’étais bien la seule personne noire. Ça m’a renversée. Ça, et quand quelqu’un m’a demandé – c’était à la première journée d’intégration –, si on m’avait donné un coup de pouce pour entrer en médecine, si on avait abaissé les critères, ou pris des mesures spéciales, pour me donner une place parce que j’étais la seule étudiante noire.

Je suis restée bouche bée, parce que je savais bien que je n’avais pas eu de traitement de faveur. Mais cette question a semé le doute en moi : est-ce que j’étais vraiment à ma place? Si une personne avait eu le culot de venir me poser cette question, qu’est-ce que les autres pensaient? Ça m’a vraiment hantée pendant ma première année. À tel point que ma santé mentale en a réellement souffert. Je me sentais comme une étrangère, et je sentais aussi une obligation de représenter ma race. Je ne me donnais donc pas droit à l’erreur, et ça a aggravé mes tendances perfectionnistes. En fait, je crois que j’ai même souffert de ce qu’on pourrait caractériser comme une dépression. J’ai alors dû aller chercher de l’aide psychologique auprès d’un médecin et d’un thérapeute, pour examiner tout ce que j’avais vécu. J’étais perdue, tendue et terrifiée. Je n’arrivais plus à dormir ni à manger. J’étais tout le temps anxieuse et j’avais le moral dans les talons. J’étais complètement désespérée à l’idée de subir le genre de microagressions que j’avais connues pendant encore quatre ans. Je n’avais personne à qui parler. Je me sentais profondément différente et je voulais parler de ce que je vivais, passer à l’action, mais j’avais peur de jeter de l’huile sur le feu.

Je n’avais plus aucun espoir, je me sentais vraiment mal dans ma peau. J’avais l’impression qu’il fallait que je cache mon identité. Ça m’a pris beaucoup de temps pour me sentir à l’aise avec le fait d’être Noire et étudiante en médecine. La force qui m’anime maintenant, elle me vient en grande partie de mes mentors dans le programme, surtout des femmes médecins, qui m’ont vraiment prise sous leur aile. Elles ont été mon réseau de soutien. Je leur dois une fière chandelle. Elles m’ont ouvert leur porte, et je peux leur parler en sachant qu’elles comprennent exactement ce que je vis, puisqu’elles sont médecins et aussi Noires. Je peux leur raconter quelque chose, et elles vont me dire qu’elles ont vécu la même chose il y a 10 ou 15 ans, ou la semaine précédente. Cette solidarité, c’est ce qui a tout changé pour moi.

Ma relation avec ces femmes m’a poussée à faire moi aussi du mentorat, que ce soit officiellement ou dans mon rôle de représentation, mes conférences, mes allocutions et mes écrits.

J’entame maintenant ma quatrième année, et je me sens bien mieux outillée. Je possède une force que je n’avais pas nécessairement au début de mes études, une force qui vient de mon travail à motiver les autres et à défendre leurs droits. Je suis fière de mon identité, je suis fière d’être une femme noire en médecine. Certaines peurs sont toujours là, oui, mais elles ne m’empêchent pas de faire ce que je dois faire. Elles sont toujours là, mais en sourdine.