Association médicale canadienne

Contexte

L’AMC a mené un sondage auprès des membres du Forum électronique afin d’orienter sa soumission au Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation de la marijuana du gouvernement du Canada. Tandis que ce dernier se prépare à déposer un projet de loi à ce sujet au printemps 2017, les personnes interrogées ont fait part de leurs préoccupations et de leurs points de vue à l’égard de la distribution, de la consommation et de la réglementation de la marijuana, ainsi que des services de soutien dont les praticiens de première ligne auront besoin. Un résumé des résultats du sondage est présenté ci-dessous.

Sondage – juillet 2016

Le sondage a été envoyé à 4 244 membres du Forum électronique; 788 y ont répondu, soit un taux de réponse de 18,57 %.

Résultats

Régime de réglementation fédéral

À la question sur le régime de réglementation que le gouvernement fédéral devrait instaurer pour l’usage de la marijuana à des fins récréatives (non médicales), 43 % des répondants se sont dits pour l’adoption d’un système unique régissant à la fois les usages à des fins récréatives et à des fins médicales. Une proportion semblable (39 %) de répondants étaient plutôt d’avis qu’il faudrait créer un système distinct pour l’usage à des fins récréatives.

Lorsque nous avons demandé aux répondants ce qu’ils changeraient à la réglementation de la marijuana à des fins médicales, voici ce qu’ils nous ont répondu (grandes lignes) :

  • Réglementer et normaliser les doses, les variétés, les teneurs en THC et en CBD;
  • Financer des projets de recherche sur les autres modes d’administration de la marijuana;
  • Augmenter le nombre de projets de recherche financés par l’État sur les bienfaits et les méfaits associés à la consommation de marijuana;
  • Donner aux médecins le choix d’autoriser ou non la consommation de marijuana;
  • Fournir aux médecins des lignes directrices concernant l’autorisation de consommer de la marijuana dans les cas qu’ils jugent nécessaires (âge minimum du patient, ressources fondées sur des données probantes);
  • Accroître la disponibilité de la marijuana pour les patients tout en la rendant moins accessible aux jeunes;
  • Permettre la souscription d’une police d’assurance couvrant l’usage de la marijuana à des fins médicales.

Distribution de la marijuana à des fins non médicales

Concernant les modèles de distribution à privilégier pour l’usage à des fins récréatives, les participants ont répondu ce qui suit :

  • 56 % étaient d’accord ou tout à fait d’accord avec la distribution dans des structures existantes non liées au domaine de la santé (p. ex. magasins d’alcools);
  • 47 % étaient d’accord ou tout à fait d’accord avec la distribution dans des comptoirs de vente autorisés dédiés (p. ex. dispensaires indépendants);
  • 29 % étaient d’accord ou tout à fait d’accord avec la distribution dans des structures liées au domaine de la santé (p. ex. pharmacies);
  • 16 % étaient d’accord ou tout à fait d’accord avec la distribution par la poste, comme la méthode actuelle employée pour la marijuana consommée à des fins médicales.

Les répondants ne s’entendaient pas sur l’idée de laisser les gouvernements provinciaux et territoriaux décider des mécanismes de distribution appropriés (35 % étaient d’accord ou tout à fait d’accord; 40 %, en désaccord ou tout à fait en désaccord).

Au sujet des modèles de distribution, les répondants ont indiqué qu’il faudrait :

  • qu’on appuie les modèles en formant efficacement le personnel, ainsi qu’en renseignant les consommateurs et en leur offrant du counseling;
  • qu’on facilite l’accès, qu’on réglemente les ventes et qu’on réalise des inspections à l’improviste;
  • qu’on restreigne l’accès aux mineurs et aux autres populations vulnérables;
  • qu’on traite la distribution de la marijuana à des fins récréatives un peu comme on le fait pour l’alcool;
  • que le gouvernement contrôle les prix et les taxes chez les dispensaires autorisés.

Culture de marijuana à des fins non médicales par des particuliers

Environ 40 % des répondants se sont dits d’accord ou tout à fait d’accord pour que l’on permette aux gens de cultiver leurs propres plants de marijuana.

Ils ont notamment mentionné ce qui suit :

  • On pourrait autoriser la culture à des fins personnelles, mais pas à des fins commerciales;
  • On pourrait fixer la limite de la culture à domicile à de petites quantités;
  • On devrait établir certains paramètres en fonction des codes du bâtiment et des protocoles de gestion des risques;
  • Il faudrait veiller à ce que les mineurs – en particulier les jeunes enfants – et les animaux de compagnie n’aient pas accès aux plants de marijuana cultivés à domicile;
  • Les contrôles et la réglementation des produits et des pesticides sont insuffisants;

Endroits où consommer de la marijuana à des fins non médicales

Nous avons demandé aux participants où la consommation à des fins récréatives devrait être permise. Près de 80 % d’entre eux ont répondu qu’ils préféreraient que la drogue soit consommée à domicile, et seulement 36 % étaient pour la consommation dans des endroits publics désignés.

Les avis quant à l’idée d’autoriser la consommation de marijuana aux endroits où l’on permet l’usage du tabac étaient partagés : 43,0 % des répondants y étaient favorables, et 43,2 %, défavorables.

Lorsque nous leur avons demandé leurs commentaires sur les endroits où permettre la consommation de marijuana à des fins récréatives, les participants ont entre autres soulevé les préoccupations suivantes :

  • la fumée secondaire dans les endroits publics ouverts;
  • l’exposition des mineurs à la fumée de la marijuana.

Âge minimum pour acheter et posséder de la marijuana à des fins non médicales

Nous avons demandé aux membres quel devrait être l’âge minimum requis pour acheter et posséder de la marijuana à des fins récréatives; 25 % des répondants ont recommandé que le gouvernement le fixe à 21 ans.

Nous leur avons ensuite demandé de justifier leur recommandation. Les principales raisons invoquées étaient les suivantes :

  • risque psychotique moindre;
  • effets indésirables sur le cerveau en développement de l’adolescent;
  • vision de la société selon laquelle, à cet âge, la personne est mature et peut assumer la responsabilité de ses gestes;
  • achat et possession de marijuana permis au même âge que la consommation d’alcool et de tabac;
  • âge de la majorité (selon la province ou le territoire du répondant).

Réglementation de la teneur en THC (puissance) de la marijuana utilisée à des fins non médicales

Dans une proportion de 72 %, les personnes interrogées ont répondu être d’accord ou tout à fait d’accord avec l’idée que le gouvernement fédéral réglemente la teneur en THC de la marijuana utilisée à des fins récréatives.

Interactions avec les patients et ressources à leur intention

De tous les répondants exerçant en milieu clinique, 60 % ont indiqué qu’ils demandaient toujours ou souvent à leurs patients s’ils consommaient de la marijuana à des fins récréatives, et 47 % estimaient détenir suffisamment de connaissances pour conseiller adéquatement leurs patients quant aux risques associés à ce type de consommation. En revanche, près de 40 % des répondants ont dit manquer d’information à ce sujet.

Lorsque nous leur avons demandé quels autres outils pourraient leur être utiles dans leur travail relatif à l’usage de marijuana à des fins récréatives, les membres du Forum électronique ont répondu ceci :

  • renseignements à jour sur les recherches portant sur les dangers de la marijuana (87 % des répondants);
  • directives pour conseiller les patients sur la consommation de marijuana et la conduite de véhicule ou l’utilisation d’équipement dangereux (80 %);
  • accès à des données portant sur la surveillance des dangers associés à l’utilisation de marijuana, p. ex. cas d’admission aux services d’urgence, décès, hospitalisations (72 %);
  • directives cliniques sur le dépistage et le suivi des utilisateurs chroniques de marijuana (71 %).

Par ailleurs, 18 % des répondants avaient autorisé au moins une fois un patient à consommer de la marijuana à des fins médicales dans la dernière année.

Profil des répondants

Répondants par provinces et Territoires (%)Répondants par segments (%)

Prochaines étapes

L’AMC continuera d’interpeller le gouvernement fédéral tout au long du processus d’élaboration des lois et des règlements visant l’usage de la marijuana à des fins non médicales, et continuera de représenter les points de vue des médecins sur cette importante question.

Commentaires des répondants

« Comme médecins, nous avons besoin d’en apprendre beaucoup plus sur ce sujet. »

« Le cadre réglementaire doit pouvoir être adapté selon les résultats des études sur les répercussions; la loi doit être plus large, et les règlements, plus précis. Il faudrait investir beaucoup d’argent dans la formation, l’information, la dénormalisation – surtout chez les jeunes – et la recherche. Plus les règlements seront clairs, mieux ils seront appliqués. Il serait d’ailleurs utile d’instaurer des mécanismes visant à faciliter la participation des citoyens à la création des connaissances requises pour appliquer ces règlements. »

« L’AMC doit jouer un rôle de premier plan pour bien faire connaître aux médecins, aux politiciens et à la population les risques associés à la marijuana. Elle doit insister sur les données nationales de surveillance des répercussions de la consommation de marijuana sur les citoyens et la société. Nous ne devons PAS revivre la tragédie du tabagisme. »

« Je me réjouis que l’AMC prenne la peine de consulter ses membres et que le dialogue sur la marijuana s’ouvre réellement. Selon moi, la marijuana se taillera une place dans la société au même titre que l’alcool et les médicaments d’ordonnance. Elle comporte des risques et des avantages, qui devront être évalués au cas par cas. Ni l’interdiction absolue ni la légalisation totale ne sont la solution. La réalisation de nouveaux travaux de recherche contribuerait sans contredit à déterminer les applications cliniques de cette substance. »

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