Lorsqu’ils ont besoin de soins de santé, les patients et patientes autochtones doivent se frayer un chemin dans un système qui a trahi leur confiance à maintes reprises. Mais chaque prestataire de soins de santé peut changer la donne.
« En tant que professionnels de la santé, nous devons réfléchir au rôle que nous pouvons jouer pour créer un système de santé axé sur la sécurité culturelle, puis passer à l’action », a déclaré le Dr Alika Lafontaine, président de l’Association médicale canadienne.
Dans le cadre d’une discussion virtuelle d’une heure sur l’importance de la sécurité culturelle dans les soins de santé, des panélistes autochtones ont discuté des façons de regagner la confiance des patients et patientes autochtones, dans un système où ils ont subi beaucoup de négligence et de préjudices.
Transcription de la vidéo
Tanya TALAGA: Bonjour, je m'appelle Tanya Talaga.
Il me fait très plaisir finalement d'être avec vous.
Je vous parle aujourd'hui de Toronto.
Moi, je suis ici.
C'est là où je vis, là où je travaille.
C'est la terre des Mississauga et c'est la patrie des Anichinabés, des Hurons-Wendats.
C'est donc un territoire où nous pouvons tous vivre ensemble et je suis reconnaissante envers les aînés, envers tous les gens que je connais, envers tout le monde tous ceux qui se réunissent ici sur l'île de Tortue.
Il me fait plaisir d'être avec vous aujourd'hui avec vous tous.
C'est une activité si importante.
Ces trois prochaines activités sont aussi importantes pour l'AMC, pour le Canada également et pour nous tous d'ailleurs.
J'aimerais vous dire que c'est la première des causeries sur la santé des autochtones.
Comme nous savons tous, la santé est un droit de base, un droit humain fondamental.
Mais partout au Canada, les peuples, les communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis sont confrontés à des situations inacceptables en matière de santé, et cela à cause de l'héritage du colonialisme et du racisme systémique.
Nous avons vécu tant depuis la naissance du Canada.
La santé est donc un droit humain fondamental, mais pour bien d'entre nous, ce n'est pas un droit humain fondamental.
L'amélioration des résultats en matière de santé pour les peuples autochtones doit commencer par des voix autochtones qui ouvrent la voie.
L'AMC organise cette série de discussions pour entendre les patients, les fournisseurs et les dirigeants autochtones sur la façon d'aller de l'avant ensemble.
Ça fait partie de l'engagement de l'AMC à prendre des mesures concrètes pour la réconciliation, pour la santé et pour les alliances avec les Premières Nations, les Métis et les Inuits.
La réforme dirigée par les autochtones est très, très importante et aujourd'hui, nous allons parler de l'importance de la sécurité culturelle dans les soins de santé, tant pour les patients que pour les prestataires.
Au cours de leur avenir, nous allons entendre deux intervenants qui nous éclaireront sur ce sujet-là.
Mais pour commencer, voici quelques informations d'ordre administratif.
Nous commencerons par une séance de questions réponses de 30 minutes avec nos intervenants, suivie d'une séance de questions réponses de 20 minutes avec le public.
Les questions plus tôt seront posées sous forme de texte et pourront être posées de cette façon.
Nous demandons à chacun de soutenir une discussion respectueuse, professionnelle et collaborative.
Les questions discriminatoires, anti fermatoires, abusives ou offensantes ou qui violent la vie privée ne seront pas traitées.
Je ne sais pas si vous m'avez entendu tantôt parce que je ne sais pas, si vous étiez tous là, mais je vous parle de Toronto, c'est la terre des Mississauga, de moi même et d'autres collectivités autochtones.
C'est le territoire traditionnel des Haudenosaunee et des Hurons-Wendats.
Je vais maintenant vous présenter les panelistes aujourd'hui.
Ça va être finalement une heure très, très intéressante.
Premièrement, permettez-moi de vous présenter quelqu'un que vous connaissez tous.
Le président de l'AMC, le docteur Alika Lafontaine, qui est un leader dans le domaine des soins de santé depuis plus de 20 ans.
Il a été président de l'Association des médecins autochtones du Canada, membre du Conseil de l'administration de HealthCareCAN.
De 2013 à 2017, il a co rédigé l'Indigenous Health Alliance qui a revendiqué 60 millions de dollars de financement fédéral au nom de plus de 150 Premières Nations, du Saskatchewan , du Manitoba, de l'Ontario.
En 2020, le docteur Lafontaine a lancé Safe Space Networks, une plateforme permettant aux patients et aux prestataires de signaler le racisme dans le système de santé et d'apporter le changement.
Maclean l'a désigné comme le plus grand innovateur en matière de santé du pays en 2023.
Il a été le premier médecin autochtone à figurer dans la liste des 50 médecins les plus importants.
Le docteur Lafontaine a des ancêtres métis, Oji-Cree et du Pacifique.
Il continue à pratiquer l'anesthésiologie à Grande Prairie, en Alberta.
En tant que Directrice Exécutive de la Transformation des Soins de Santé chez Health Care Excellence Canada, Denise McCuaig aide les dirigeants et les équipes à porter des améliorations durables.
Elle s'intéresse notamment à la sécurité des patients et à l'expérience des patients, des soignants et des communautés.
Avant d'occuper son poste actuel, elle a travaillé à Interior Health dans la région de Thompson Cariboo, en Colombie-Britannique.
Elle était directrice de la santé autochtone et de la santé mentale et de la toxicomanie.
En reconnaissance de ses nombreuses années de leadership dans le secteur à but non lucratif, on lui a décerné le prix champion de Mental Health.
Madame McCuaig est une femme métisse, patiente et aide-soignant.
Merci d'être des nôtres ce soir.
Notre première question pour ce soir.
À quoi ressemble une expérience de santé culturellement sûre?
En quoi cela diffère-t-il de ce que nous avons aujourd'hui?
On va commencer avec le docteur Lafontaine.
Alika LAFONTAINE: Merci Tanya.
Vous pouvez m'appeler Alika si vous voulez, ça va un peu se tutoyer, c'est moins formel.
Je préfère cela.
Je suis très content d'être là et d'être accompagné de Denise ce soir pour avoir cette discussion.
J'ai eu deux expériences.
Tout d'abord, être médecin et expliquer...
Je vais vous expliquer ce que je veux dire.
Ensuite, être frère, fils, père et recevoir les soins de santé moi-même.
Pour ceux d'entre nous qui avons vécu la même expérience, quelqu'un qui offre les soins, dispense les soins et reçoit les soins, c'est les deux revers de la médaille, si vous voulez.
Comme médecin, je pense qu'on se rend compte du fait qu'on dispose de beaucoup de pouvoirs.
C'est quelque chose qu'on vous donne, tout simplement.
Vous portez le titre de médecin parce que vous êtes qui vous êtes, mais vous pouvez prendre des décisions qui vont avoir une incidence sur vos patients.
La sécurité culturelle, qu'est-ce que ça veut dire?
Ça veut dire la bonne utilisation de ce pouvoir, l'utilisation judicieuse.
Des fois, on a tendance à compliquer finalement à rendre ce terme beaucoup plus compliqué que ça ne devrait être en réalité.
Il faut donner le pouvoir, le contrôle aux patients et leurs familles à des moments où on a l'impression finalement qu'ils n'ont aucun contrôle sur la vie.
C'est ça la sécurité culturelle et ça, c'est du point de vue d'un fournisseur.
Pour ce qui est des patients, quelqu'un qui reçoit les soins, comment est-ce que je décrirais cela?
L'absence d'hostilité.
Avoir l'impression que le fournisseur nous voit et pas une caricature, qu'on ne soit pas obligé, finalement, de nous battre.
Peut être ne pas devoir dire, Écoutez, vous ne devriez pas traiter cette personne de cette façon, parce que cette personne ne se sent pas en sécurité.
Qu'est ce que c'est la sécurité culturelle?
La sécurité culturelle, est le fait de pouvoir jouir des possibilités et de pouvoir...
réfléchir finalement ou d'être traité comme une personne qui n'a pas à s'associer de la sécurité culturelle.
Tanya TALAGA: Madame McCuaig, qu'est-ce que c'est finalement une expérience qui est culturellement sûre?
Denise McCUAIG: Merci Tanya, c'est une bonne question.
Le mot clé, c'est l'expérience.
Je vais maintenant exprimer la perspective d'une patiente autochtone.
Une expérience culturellement sûre doit être basée sur le choix.
Pendant très longtemps, on n'a pas eu de choix pour les patients autochtones.
On n'avait pas de choix.
On n'avait pas de choix pour ce qu'on pouvait porter, manger, langue, parler, aucun choix du tout.
Ça, c'est qu'un exemple de comment on a enlevé le choix de notre expérience, de notre vécu.
L'idée de me donner un choix dans le domaine de la santé, finalement, me rassure.
Le traumatisme n'est pas un seul événement.
Il faut qu'on reconnaisse que notre expérience...
notre expérience du colonialisme et nos expériences historiques peuvent mener au traumatisme.
Vivre une vie de microagressions après microagressions après microagressions peut mener à du traumatisme.
Il s'agit également de ne pas nous juger.
Il s'agit de reconnaître le fait que la colonisation, finalement, a contribué à mon état de santé actuel.
Je pense que si on tient compte de tous ces éléments, on aurait une expérience plus sûre sur le plan culturel.
Il y a plus de possibilités pour les fournisseurs de soins de santé à comprendre notre vécu, notre expérience au Canada.
C'est maintenant possible pour les fournisseurs d'apprendre sur notre expérience.
Ça veut dire que les professionnels de la santé devraient finalement aller chercher des informations, des connaissances.
Le fardeau de sensibilisation ne serait pas uniquement le mien.
Vous avez parlé avec beaucoup d'éloquence.
Tanya TALAGA: Merci beaucoup.
J'aimerais prendre l'occasion de souhaiter la bienvenue à tous les participants.
Il y a eu des petits problèmes techniques.
Bienvenue à ceux qui viennent de se contacter.
Nous, on s'excuse finalement des retards.
Mais vous êtes arrivés à un bon moment, finalement.
Maintenant, je vais poser une question sur la confiance dans le système de santé.
La confiance dans le système de santé s'est dégradée, n'est ce pas?
La confiance a toujours été problématique pour les autochtones, mais l'accès semble s'être dégradé également.
Donc la confiance et l'accès ont pire également.
Pourriez-vous nous parler de l'expérience des autochtones quand on n'a fait pas confiance au système de santé, mais quand il faut aller chercher les soins, il faut attendre longtemps, l'accès illimité, alors les patients autochtones, comment est-ce que ça les touche?
Quelle est l'incidence sur eux?
On va commencer avec vous, Docteur Lafontaine.
Je m'excuse, je veux dire Alika.
Alika LAFONTAINE: La confiance et l'accès accélèrent plutôt la dégradation, la détérioration des soins de santé.
On a tendance à faire confiance la première fois.
Une fois qu'il y a une trahison, c'est très difficile à faire confiance à nouveau.
Je pense que la plupart des médecins veulent qu'on leur fasse confiance.
Quand j'ai décidé de devenir médecin, j'ai dû trouver une réponse à la question, à savoir pourquoi je voulais devenir médecin et quelle a été ma réponse?
Eh bien, c'est un des seuls emplois dans le monde où on peut, Où on nous fait confiance.
Même si on ne parle pas la même langue, on va rencontrer quelqu'un pour la première fois et quand personne découvre que vous êtes médecin, ils vont commencer à parler de leur état de santé.
Moi, je suis anesthésiologiste et quand les patients arrivent, ils sont blessés, ils doivent vous faire confiance tout de suite parce que la personne, le patient n'a pas l'impression d'avoir le contrôle sur leur vie.
Et pour les patients autochtones qui arrivent via ce système, ils ont été trahi à maintes reprises par des systèmes qui étaient censés être dignes de confiance.
Qu'il s'agisse historiquement à partir du premier contact ou tout ce qui se passe depuis plus de 100 ans, quand il s'agit des engagements et des suivis sur toutes sortes d'autres sujets à part la santé.
Cette confiance a été brisée de multiples fois.
Mais quand les patients viennent chez vous, c'est parce qu'ils veulent faire confiance.
Ça ne veut pas dire qu'ils vous font confiance, mais ils voudraient faire confiance.
Donc, en tant que fournisseur de services de santé, c'est important de reconnaître que la confiance est quelque chose que l'on doit mériter, pas quelque chose que l'on peut susciter ou exiger.
Il faut donner aux gens l'espace nécessaire.
Des fois, les patients sont très en colère parce qu'ils ont vécu des expériences horribles.
Ils ont été trahis et il faut leur donner cet espace pour qu'ils s'expriment.
Quand j'entends les patients qui sont frustrés ou qui sont énervés du type de soins qu'ils ont reçu par le passé, au moins ils savent que même en déversant leur colère sur moi, je me rends compte que ce n'est pas contre moi qu'ils en ont, c'est contre le système.
Je crois que ce que l'on doit penser c'est que ça prend beaucoup de temps, beaucoup de ressources pour aider quelqu'un qui ne fait pas confiance au système à faire face aux hauts et aux bas.
Les gens partagent avec moi, les choses qu'ils ne partageraient pas avec les autres, normalement, très facilement.
Ils sont ouverts sur leur frustration ou s'ils ne croient pas ce que vous venez de suggérer.
Peut-être qu'ils peuvent mentionner quelque chose qui ferait un meilleur plan de traitement.
Il faut maximiser non seulement l'expérience du patient qui est devant vous, mais il faut assurer aussi que d'autres patients puissent avoir accès aux mêmes soins.
Parce que quand le patient fait confiance, ça aide tout le monde.
Je n'ai pas encore rencontré un docteur qui aime rentrer et travailler dans un environnement où il n'y a pas beaucoup de confiance en eux.
Ce n'est pas très agréable, mais nous avons un choix qui est de créer un environnement qui est plus digne de confiance.
Tanya TALAGA: Denise, je voulais vous demander, quand on parle de confiance, je me demande quelles sont les expériences des patients autochtones que vous voyez dans votre pratique?
Denise McCUAIG: Je crois que le problème que je vois autour de la confiance, c'est la sécurité culturelle.
Ça, c'est quelque chose qui doit être déterminé par la personne qui reçoit le soin, non pas par celui qui le prodigue.
Une des façons que l'on peut augmenter la confiance, c'est d'être moins sur la défensive, sur ce que nous, on peut faire pour changer les choses.
Par exemple, les temps d'attente dans les salles d'urgence à l'hôpital.
Quand on est Première Nation ou Inuit ou Métis, on a l'impression d'être ignorés à cause de notre ethnicité.
On a tous entendu parler de l'histoire de Brian Sinclair et pendant l'enquête, on a dit, Il est mort dans une salle d'attente de l'hôpital en urgence après 36 heures après ne pas avoir été vu.
Si c'est votre contexte mental quand vous arrivez dans cet endroit et le fournisseur dit Non, nous avons des standard de triage, ça n'a rien à voir avec votre ethnicité.
Vous avez attendus à cause de ce que vous nous avez donné comme renseignements et vous êtes dans la queue.
C'est peut être le cas, mais ça ne suscite pas la confiance.
Si j'entends, Oui, ce n'est pas moi le praticien, c'est le système.
C'est vrai que le système a beaucoup de défis à relever.
Je sais que de l'autre côté, on est focussé sur le temps d'attente pour les chirurgies, pour les hanches et les genoux.
Mais quand on voit le pourcentage de la population qui a plus de 65 ans, nous qui sommes Premières nations, Inuits et Métis, nous avons plus de maladies proportionnellement.
Donc, les besoins pour faire remplacer les genoux et les hanches, c'est probablement vers 45 ans et pas 65 ans.
Si le fournisseur de santé dit, Non, c'est le système qui est la barrière.
sans reconnaître le rôle qu'eux peuvent jouer pour agir sur nos préoccupations, ça peut créer un climat encore moins digne de confiance.
En tant que fournisseur, nous devons écouter nos patients.
Nous devons agir et réfléchir à comment on peut changer le système.
Je pense que ça aurait des effets très positifs sur la création du degré de confiance entre les fournisseurs et les peuples autochtones.
Tanya TALAGA: Qu'est-ce que l'on doit changer?
Comment est-ce que l'on peut changer les choses?
On a l'impression que c'est presque impossible à faire, mais comment est ce que l'on peut créer ces espaces de sécurité dans les soins de santé pour les autochtones?
Alika LAFONTAINE: On est en train de vivre un peu le même cycle.
Regardez ce qui s'est passé à Brian Sinclair comme vous l'avez dit.
L'impact de cette expérience a atteint les gens.
Et tout d'un coup, au Canada, les gens se sont mis à commencer à parler du racisme anti autochtone.
Et il y a eu un changement positif qui s'est passé à travers le pays.
Mais à partir de ce moment là aussi, il y a eu d'autres aspects qui se sont passés.
Les gens ont commencé à accepter les choses que nous on dit, ce qu'on a mentionné, comme si c'était normal encore une fois, comme l'exemple de Sinclair ou quoi.
Les gens ne se rendent pas compte qu'on n'a pas encore résolu certains problèmes.
Je mettrais l'accent sur deux choses.
L'éducation.
L'éducation en soi ne change rien.
On peut savoir que quelque chose se passe, mais si on ne réfléchit pas à qu'est-ce que l'on peut faire pour essayer de régler ce problème, on ne peut pas le résoudre parce qu'on doit s'impliquer.
La deuxième partie, Denise l'a mentionnée un peu.
Il faut que le fournisseur se rende compte du mal qu'il est en train de faire et qu'il a fait.
Et ça, c'est dur.
Quand on est infirmière ou médecin et on est en appel depuis 30 heures et on est là, on est en train de travailler.
Est ce qu'ils ont traité quelqu'un de façon culturellement insensible?
Donc, participer au mal.
Quand on rentre dans cet espace de sécurité culturelle, il faut vraiment changer d'attitude et changer la façon dont on se considère soi-même.
Les Canadiens prennent beaucoup de choses pour acquis.
L'idée que les patients de Premières Nations ne se préoccupent pas de leur santé, n'ont pas la capacité de comprendre ce que l'on leur explique, que je prends une décision sans vous consulter, mais je le fais ça de façon paternaliste, sans vous demander quoi que ce soit.
C'est notre héritage de la colonisation qui est ici à l'œuvre.
Beaucoup de choses doivent changer et certaines vérités qui ne sont pas très agréables à dire doivent être dites et examinées.
Tanya TALAGA: Oui, ça c'est vrai.
J'ai une question et après ça, il va falloir changer à des questions du public.
Je dirais au public que si vous avez des questions que vous voulez nous poser, mettez les dans le chat et soumettez les avec le bouton et vous pouvez aussi les télécharger.
Est-ce que la sécurité culturelle, est ce que c'est différent de la réconciliation?
Donc, on a cinq minutes pour répondre.
Est-ce que c'est différent de la réconciliation?
Ça va être répétant si vous arrivez à répondre en cinq minutes.
Oui, Denise, je vais commencer avec vous et après ça, Alika.
Denise McCUAIG: Je dirais que oui, c'est différent, mais en même temps, il y a des choses qui sont semblables.
La sécurité culturelle et la réconciliation sont un voyage, un cheminement.
C'est quelque chose qui se passe pendant une vie entière.
Quand on pense à la sécurité culturelle, il y a la conscientisation, la reconnaissance que quelque chose est différent, qu'on est différent.
Notre propre culture, notre propre privilège, biais, vos talents, vos compétences, la compréhension de là où vous êtes et d'agir.
Tout ça, c'est le cheminement vers la sécurité culturelle.
Pour moi, la réconciliation, c'est la même chose, c'est la réparation de relations.
Je crois qu'on doit passer de l'idée que la réconciliation, c'est entre vous, le fournisseur et le patient.
Ce n'est peut-être pas ça, la réconciliation entre une personne et une autre personne.
Il s'agit en fait de reconnaître que la société, les systèmes, les institutions avec lesquelles vous avez grandi ont contribué à créer un privilège pour vous et certains biais, certains préjugés.
Et une fois que vous le reconnaissez, il faut le déballer et le regarder, l'examiner et regarder le relationnel.
Il y a des choses qui sont semblables dans ces deux aspects, mais ils sont assez différents aussi.
Mettez l'accent sur ces deux choses comme étant un cheminement à vie et non pas une destination en soi.
Tanya TALAGA: Oui c'est vrai que ce sont des choses qui sont très parallèles.
Alika, qu'est-ce que vous en pensez de cette différence entre la réconciliation et la sécurité culturelle?
Alika LAFONTAINE: Oui, je suis d'accord avec Denise, mais je l'expliquais peut être différemment.
Je pense que la sécurité culturelle, on peut le faire tout de suite, mais la réconciliation, ça va prendre un peu plus de temps.
La sécurité culturelle est un manque d'hostilité et ça, c'est quelque chose que l'on peut faire maintenant, même s'il y a encore des préjugés, des biais et toutes sortes de choses qui ne vont pas nécessairement disparaître.
Mais nous devons nous considérer comme étant des amis, nous devons changer.
C'est au niveau de la société.
Il y a des choses qui sont normalisées et qui sont mauvaises pour les autochtones.
Dans la réconciliation, il y a des attitudes qui changent.
Tanya TALAGA: Oui, c'est très bien exprimé. Merci.
Je me demande, Denise, vous pouvez peut être nous donner un point de vue de l'Ouest canadien.
Nous honorons là où vous venez et nous voici à la mi mai.
Il y a deux ans, les 200 personnes manquantes ont été redécouvertes dans l'école, le pensionnat à Kamloops.
Qu'est-ce que vous voyez comme étant différent depuis deux ans?
Quand on parle de sécurité culturelle, une des choses que nous avons constatées dans les découvertes à travers le Canada et dans les communautés des Premières Nations, c'est que des blessures sont ouvertes parce que c'est difficile à comprendre.
Qu'avez-vous constaté de là où vous habitez?
Denise McCUAIG: J'aime bien cette idée découverte.
Moi, je dis confirmée.
250 personnes ont été découvertes et nous, et nous, on savait qu'elles étaient là et elles ont été redécouvertes.
Mais peut être que c'est l'idée que c'était des enfants qui a choqué les gens.
Et c'est peut être ça qui a fait en sorte que les gens ont réagi différemment.
Je me souviens après que l'annonce a été faite à Kamloops et j'habite peut être à un demi kilomètre d'une école primaire à Kamloops et je me souviens d'avoir vu plein de gens en train de porter des T-shirts orange.
Les enfants, les parents, les chauffeurs d'autobus scolaires.
Je suis allée à la banque, à l'épicerie, tout le monde portait des chemises orange.
Je n'avais jamais vécu ce genre de choses et toute la ville de Kamloops était soudainement réveillée.
J'avais des amis et des collègues, tout d'un coup, commençaient à m'appeler pour commencer à me poser des questions et je dois être honnête, ma première réaction était une de colère.
Je me suis dit, Ça a pris seulement 30 ans, depuis que je suis là en train de faire de la sécurité et de la formation pour les autochtones et vous savez que je vis que ça.
Et ça a pris un événement comme celui-ci avant qu'on m'appelle pour qu'on commence à me poser des questions.
Mai, une fois que j'avais vraiment compris pourquoi j'étais en colère, je me suis dit Écoutez, ces enfants nous ont fait un don.
Ils ont ouvert une porte qu'on n'arrivait pas à ouvrir d'une autre façon.
Les conversations que j'ai eues depuis deux ans sont beaucoup plus riches, beaucoup plus importantes et beaucoup de mes collègues, finalement, composent avec leurs peurs.
Ils me posent des questions difficiles qu'ils avaient peur de poser autrefois.
Je les salue pour cela et j'espère que si jamais ils font face à de la colère de notre côté, soyez patient, continuez à poser vos questions.
Sachez que chaque personne est à une étape différente de leur guérison et peut être la personne ne va pas réagir de la façon que vous voudriez.
Mais si nous devons finalement nous réconcilier, vous devez continuer à poser vos questions, à nous appuyer.
Tanya TALAGA: McCuaig, merci beaucoup.
C'est quelque chose auquel on ne pense pas forcément quand on fait face en tant que fournisseur de soins de santé autochtone.
Nous sommes des gens, des personnes, après tout, il s'agit de nos collectivités et nous vivons cela de façon différente.
J'ai déjà passé beaucoup de temps à Kamloops cinq fois en deux ans, finalement, donc j'apprécie ce que vous dites et je pense à tous les résidents de Kamloops maintenant.
Nous avons donc une question, la première question du public qui nous est arrivée.
La confiance est gagnée, n'est-ce pas?
Est-ce que vous pourriez parler des méthodes qu'un médecin non autochtone peut utiliser pour obtenir la confiance ou gagner la confiance des patients autochtones, Alika à vous?
Alika LAFONTAINE: Je pense qu'on doit gagner la confiance.
Peu importe la situation, les fournisseurs doivent acquérir les compétences qu'on n'apprend pas à l'école de médecine, c'est savoir comment gérer le conflit.
Et comme vous avez dit, il faut qu'on gère nos propres émotions, nos propres sentiments, n'est-ce pas?
Comme vous avez dit, Denise, c'est difficile quand on est déjà débordé, fatigué, de faire face à quelqu'un qui souffre également.
Parce qu’on est là pour dispenser les meilleurs soins possibles, n'est-ce pas?
Moi, je crois sincèrement que les patients ont leurs premières impressions de vous, comme vous deux.
Si vous avez l'air d'être en colère, si vous n'êtes pas accueillants quand vous abordez un à un patient si vous ne prenez pas le temps de leur parler.
Tout cela, finalement, mène à une situation où il n'y a pas de confiance entre le médecin et le patient.
Le meilleur conseil que je pourrais vous donner, regardez autour de vous, là où vous travaillez et identifiez les comportements, finalement, qui vous mettraient mal à l'aise.
Essayez d'éviter ces mêmes comportements, n'est-ce pas?
Répondre sèchement aux patients, ne pas prendre leurs préoccupations au sérieux.
Ça, c'est vraiment nuisible quand on interrompt un patient et dire aux patients, écoutez ce que vous dites n'est pas important.
Il faut vraiment communiquer aux patients le plan que vous avez pour eux.
Quand on n'est pas médecin, on a peur parce qu'on ne sait pas ce qui vous arrive.
C'est impossible plutôt de vraiment permettre à une personne de comprendre complètement ce qui va leur arriver, mais on peut leur expliquer les étapes du traitement, comment on va les appuyer.
Pour les gens qui se sentent en sécurité sur le plan culturel, ces gens veulent finalement un accueil chaleureux.
Ils ne veulent pas se sentir abandonnés.
Alors, je pense que tout cela peut servir à améliorer l'expérience des patients qui aient souvent une expérience vraiment douloureuse.
Tanya TALAGA: Une autre bonne question.
Comme étudiant de médecine autochtone, comment est-ce qu'on peut faire la place pour l'enseignement des moyens de guérison des traitements autochtones?
Comment est-ce qu'on peut finalement rendre les soins de santé plus inclusifs pour nos patients autochtones si on n'a pas appris finalement ces connaissances?
Denise, vous opinez du Bonnet, donc à vous de répondre à cette question.
Je devrais apprendre de ne pas opiner du Bonnet, n'est-ce pas?
Denise McCUAIG: C'est une question finalement qui me parle vraiment.
Je pense qu'il y a des compétences qu'on pourrait enseigner.
Trop souvent, on reste au niveau de la théorie, sans donner d'exemples concrets.
On parle finalement de donner une réponse forte.
Qu'est-ce que ça veut dire?
En psychologie, on parle d’enquête appréciative.
Prenons un médecin de famille.
Si vous essayez de voir si je prends les médicaments que vous m'avez prescrits?
Si vous me dites tout simplement Écoutez, est ce que vous prenez les médicaments que je vous ai prescrits?
Là, vous êtes en train d'évaluer, finalement, mes défauts.
Mais si vous dites plutôt Écoutez, j'ai prescrit des médicaments lors de notre dernière consultation.
Est-ce que ça vous a aidé?
Est-ce que ça a changé quelque chose?
C'est très différent.
Et si vous prenez le temps, finalement de vraiment me parler, vous allez donc renforcer la confiance entre vous et le patient.
Donc, il y a l'enquête, les questions appréciatives, c'est une compétence qu'on peut acquérir.
Le deuxième élément, plutôt, c'est?
Vous voulez aider. Donc, vous voulez poser des questions sur mes pratiques spirituelles et sur la compréhension de ma culture, mais vous n'avez pas de relation avec moi.
Vous n'avez pas donné assez d'informations pour montrer que vous avez pris le temps pour essayer de comprendre mon vécu.
Alors, me demander finalement de parler de mon expérience personnelle, de la persécution que j'ai vécue ne va pas finalement renforcer la confiance entre le patient et le médecin.
Il faut parler aux étudiants de médecine des expériences vécues par les autochtones?
Tanya TALAGA: Alika, qu'est-ce que vous diriez à un étudiant en médecine autochtone?
Comment est-ce qu'on peut finalement faire plus de place pour l'enseignement des pratiques autochtones?
Alika LAFONTAINE: Je vais vous donner une réponse pragmatique.
Vous n'allez pas finalement acquérir cela à l'école de médecine, mais Denise a abordé deux éléments très importants.
Tout d'abord, la connaissance de la médecine traditionnelle.
Dans les pays occidentaux, on traite les connaissances comme étant accessible à tout le monde.
Mais pour nous, les connaissances doivent être gagnées.
Comment passer du temps pour gagner la confiance des aînés?
Aller à la recherche de ces plantes et de ces herbes qui ne poussent pas partout d'ailleurs.
Il s'agit d'aller cueillir les plantes médicinales et de participer aux cérémonies, n'est-ce pas?
C'est une façon pour une collectivité.
Il faut participer aux célébrations des collectivités également.
Ces connaissances ne peuvent pas être apprises à l'école de médecine.
Ça, c'est la première chose.
Le deuxième élément, c'est connaître notre propre histoire.
Quand les Colonnes sont arrivés au Canada, les Européens croyaient qu'il fallait signer ceux qui étaient malades.
Les autochtones et les Inuits avaient d'autres méthodes des tisanes médicinales.
L'atropine, finalement, qui provient de la plante belladonna.
L'aspirine, finalement, de l'écorce du sol.
Il y a beaucoup de médicaments que j'utilise, finalement, qui proviennent des plantes à l'origine.
La séparation ou l'écart entre la médecine occidentale et la médecine autochtone est un peu plus artificielle, finalement.
Bien des avancées, finalement, dans le cadre de la médecine occidentale ont été possibles grâce à la connaissance autochtone.
Il y a donc de la médecine traditionnelle autochtone qui se trouve dans la médecine occidentale.
Si vous voulez vraiment apprendre sur la médecine autochtone, vous allez devoir aller dans les collectivités pour l'apprendre.
Tanya TALAGA: C'est une réponse qui est tout à fait vraie.
On a besoin de la réforme de l'éducation, surtout pour ce qui est de la médecine.
Je vous écoute parler de l'enseignement en salle de classe, alors il faut qu'on progresse et il faut que l'enseignement évolue.
Une autre question.
Quelles sont les croyances autochtones sur la préservation du corps?
Je suis chirurgien vasculaire et je vois les patients autochtones qui ont besoin de se faire amputer une partie du corps.
Malheureusement, nous avons tendance à réagir.
Il n'y a pas beaucoup de traitements de prévention auprès de ces populations très vulnérables.
Êtes-vous d'accord avec cette déclaration, Denise?
Denise McCUAIG: Oui.
Je ne sais pas s'il n'y a pas de traitement de prévention.
Il y a toute la question des ressources qui sont affectées à la prévention.
Par exemple, moi, je suis diabétique, j'ai le diabète et le diabète est souvent précurseur de l'amputation et des maladies cardiovasculaires, n'est-ce pas?
On m'est envoyé un programme où j'ai passé beaucoup de temps avec d'autres gens qui viennent de découvrir qu'ils sont également diabétiques.
Il y avait un nutritionniste qui me parlait de ce que je devais manger.
On n'a pas parlé de la sécurité alimentaire.
On n'a pas tenu compte de la source de mes aliments.
Une personne dans le Nord doit payer 8 $ pour une salade ou 9 $ pour un litre de lait des gens bien intentionnés, finalement, qui ne tiennent pas compte de notre réalité.
On ne tient pas compte de notre réalité.
Le deuxième jour, quand j'ai décidé de ne pas revenir, parce que c'était une perte de temps pour moi, il s'agissait là, selon eux, de ma non-conformité, mon refus.
Il faut vraiment écouter les perspectives des autochtones et on doit intégrer cette voie dans les services de soins de santé.
Si on fait cela, plus on aura de succès à réduire la maladie cardiovasculaire.
Mais si on continue finalement à offrir les soins qui ne tiennent pas compte du vécu ou de la réalité des métis et des autochtones, on va continuer à avoir cette conversation, même dans dix ans.
Merci.
Tanya TALAGA: Avez-vous des exemples de la rétroaction des patients autochtones, à savoir quand un médecin non autochtone a bien fait quelque chose?
Alika LAFONTAINE: J'ai beaucoup d'exemples.
Des fois, dans la discussion de la sécurité culturelle, on oublie qu'il y a des patients qui sont formidables.
Peu importe leurs frustrations, ils sont très satisfaits du traitement qu'on leur dispense.
Si j'entends des gens en train de rire dans la salle d'attente, il y a presque toujours quelqu'un qui est là.
Souvent, les autochtones sont là en train de faire des blagues et même dans des grandes difficultés, ce sont des gens qui maintiennent leur sens de l'humour.
Ils aiment être heureux.
C'est comme ça que nous avons pu vivre à travers tous ces stress.
Je crois que pour la plupart, la majorité des gens qui travaillent en médecine sont des gens qui veulent véritablement aider les gens.
Ils veulent que les gens se sentent mieux quand ils sont venus chez eux et les voir.
J'ai une expérience il y a longtemps, j'avais un collègue qui travaillait en oncologie et il a exprimé quelques traitements.
Il s'est plaint parce que le patient commençait une chimiothérapie en même temps que la médecine traditionnelle autochtone avec les gardiens de la connaissance.
Et on a eu des discussions.
Ils ont essayé de combler la lacune entre les deux et à la fin pourquoi est-ce que vous n'avez pas envoyé la liste des médicaments avec la patiente pour que le patient puisse montrer cette liste de médicaments aux gardiens de la connaissance pour voir qu'est ce qui se passe?
Parce qu'ils voient le patient a pris cette information et quelques semaines plus tard, j'ai parlé à mon collègue et elle m'a dit qu'elle tenait une conversation ouverte avec la gardiennes des connaissances et le patient.
Ils étaient très surpris eux-mêmes de leur réaction parce qu'en traitant la personne qui était un guérisseur en tant que collègue plutôt qu'un charlatan ou quelqu'un qui ne savait pas ce qu'il faisait.
En fait, ça les a rapprochés.
Le collègue m'a dit que c'était la meilleure expérience qu'ils avaient jamais eue en 20 ans de travail.
Il avait eu l'impression vraiment d'avoir eu un effet sur la vie de cette personne.
Tanya TALAGA: Denise, avez-vous des exemples?
Denise McCUAIG: Oui, j'en ai plein, mais il y en a un en particulier qui me vient à l'esprit.
On avait un patient qui était quadriplégique, qui avait 24 ans seulement et malheureusement, il est mort.
Il était autochtone, évidemment.
La famille a demandé si leur guide spirituel pouvait être là, mais aussi leur infirmière qui venait de la réserve, là où habitait la personne décédée et qui avait aidé toute sa vie pour pouvoir enlever les tubes et tout pour pouvoir préparer son corps.
J'ai vu que le personnel hospitalier a tout fait pour aider.
Ils ont appliqué leurs politiques, évidemment, mais ils ont créé un espace pour que ça puisse se passer.
Je crois que ça a changé la façon dont cette famille pouvait enfin vivre son deuil.
Ils ont vu toute l'équipe participer.
Il y avait les infirmières, les médecins, même les gens du nettoyage ont aidé.
Tout le monde a respecté le processus et trouver une façon de combler les désirs de la famille.
Ça n'a pas toujours été le cas, évidemment, mais cette fois là, ça m'a vraiment touché.
Alika LAFONTAINE: Dans notre hôpital, qui vient juste d'être ouvert, ils ont changé la ventilation pour qu'on puisse faire le Smudge, c'est à dire la cérémonie du foin d'odeur à chaque fois.
Donc, il y a des choses positives quand même qui se passent.
Tanya TALAGA: En tant que médecin et membre de l'AMC, vous pouvez avoir votre mot à dire dans vos hôpitaux et pour transformer les expériences des patients, par exemple, donner des soins qui sont culturellement appropriés et sensibles.
Vous pouvez exercer votre pouvoir si vous le désirez.
Ce serait agréable d'entendre plus d'histoires de ce genre.
Nous avons une question supplémentaire.
Nos systèmes sont souvent axés, centrés sur le fournisseur.
Qu'est-ce que l'on peut faire pour surmonter cela et cultiver l'humidité ainsi que la sensibilité ou la consentisation envers l'autre culturellement.
Denise McCUAIG: Je crois que quand on a des soins pour le patient qui sont vraiment centrés sur le patient, oui, ce serait utile.
De reconnaître la structure de puissance, comme Alika l'a dit, ce pouvoir que l'on a automatiquement quand on enfile la blouse blanche et d'aller vers l'écoute de la voix autochtone, du patient autochtone et ça doit faire partie constante.
Il ne faut pas venir nous voir comme si on était dans un groupe d'écoute et puis après ça, prendre des informations et puis après ça, ne pas avoir une présence continue.
Non. Pour moi, je crois que ça doit être continu.
Les patients autochtones doivent faire partie de la considération à tous les niveaux, en tout temps.
Peut-être que les universitaires appelleraient ça un leadership en pluralité.
On fait ce que l'on peut pour aplatir la hiérarchie en s'assurant que tout le monde dans le cheminement ait son importance.
Tanya TALAGA: Oui, Alika?
Alika LAFONTAINE: Je peux peut être modifier cette...
Je ne crois pas que nous avons des systèmes qui sont centrés sur le médecin maintenant.
En fait, c'est centré sur les coûts, les frais.
Combien de patients est ce que l'on peut voir pour le moins d'argent?
Le système, en fait, ne se centre plus autour ni des fournisseurs ni des patients, surtout.
C'est seulement ce qui est le moins cher.
Je crois que si on changeait cela et qu'on commençait à considérer l'expérience des patients, ce serait très bien.
Qu'est-ce qu'on essaye de créer pour les gens?
Je crois que l'on peut économiser en donnant des soins de grande qualité, mais il faut mettre vraiment l'accent là dessus.
Si on donne des soins de grande qualité, évidemment que ça va coûter moins cher.
C'est tout à fait logique.
La prochaine fois que vous vous sentez dans un environnement où vous vous sentez culturellement mal à l'aise ou en danger, pensez, Qu'est-ce que je peux faire pour améliorer les choses?
Brian Sinclair aurait pu survivre si une seule infirmière ou un seul médecin avait, pendant les 36 heures où il était là, et s'était dit Non, ce n'est pas correct, c'est ça.
Ça aurait été la même chose pour Joyce au Québec.
Si ça avait été quelqu'un, s'était dit Mais qu'est-ce que je fais?
Il faut prendre cette pause.
Je pense que la sécurité culturelle peut devenir une réalité.
Maintenant même, ça peut faire un peu peur, mais c'est beaucoup plus épurant pour la personne qui n'a rien du tout.
Tanya TALAGA: Oui, très bien dit.
En vous écoutant tous les deux, en écoutant vos expériences, on sent qu'il y a un besoin de changement et que l'on cherche ce changement.
Ça me rappelle que nous tous, nous devons engendrer ce changement nous-mêmes.
Chacun d'entre nous, dans notre environnement de travail, doit être là pour pousser et encourager ce changement, de faire ce changement, parce qu'on ne peut pas attendre à ce que des institutions ou des gouvernements ou des conseils d'administration changent les choses pour vous.
Vous pouvez faire la chose qu'il faut faire dans vos propres sphères et agir vous même.
Je pense que ça, c'est quelque chose qui a été bien expliqué par Denise et Alika ce soir.
Il faut comprendre ce que ça veut dire, cette sécurité culturelle.
Ce n'est pas simplement une phrase vide, c'est en fait plein de sens.
Pour voir de quoi aurait l'air la réconciliation, il faut d'abord examiner nos propres rôles que nous jouons.
Vous, en tant que fournisseur de soins de santé, vous regardez cette question-là de très près.
Vous regardez l'historique de ce qui s'est passé dans ce pays depuis les pensionnats aux hôpitaux et aux mauvais soins que les gens ont encore.
Pourquoi?
Parce qu'il n'y a pas d'infirmière ou de médecin là où ils vivent et il n'y a pas d'endroit où on peut attendre là où ils sont.
Mais malgré tout, ça m'encourage.
Je vois que l'AMC fait ses changements et essaye d'être le changement.
Aujourd'hui, nous avons...
Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de regarder le chat ce soir, le clavardage, mais plein de gens ont fait des suggestions sur quoi lire ou des programmes qui existent en Alberta.
J'ai lu quelque chose, par exemple, qu'on peut avoir les soins culturellement adaptés qui arrivent chez vous dans l'espace d'une heure.
Incroyable, je suis ravie de l'entendre.
Il y a beaucoup de choses qui se passent.
Et des forums comme celui-ci, justement, sont importants pour engendrer ce changement.
Je tiens à remercier tout le monde d'avoir pris le temps de nous rejoindre et à McCuaig à Docteur Alika Lafontaine d'être ici ce soir et je tiens à remercier Denise McCuaig personnellement.
Je crois que la conversation que nous avons tenu ce soir est très importante et je pense que c'est le début de nombreuses conversations du genre.
Nous allons être les hôtes d'un webinaire de ce genre qui va se passer le 24 mai et nous allons parler de comment améliorer la santé des personnes autochtones.
Vous pouvez vous inscrire dans le chat.
J'espère que vous allez être des nôtres pour la prochaine séance.
C'est important que vous participiez dans des forums tels que celui-ci, pour mieux comprendre ce que les paroles veulent dire, ce que les phrases veulent dire quand on parle de confiance ou de ce que sécurité culturelle et de la création de la confiance.
Avec tout ça, je dis McCuaig à tout le monde et j'ai hâte de vous parler le 24 et de vous revoir le 24 mai.
McCuaig, bonne vie et je vous verrai là dans quelques semaines.
Au revoir.
L’auteure et journaliste Tanya Talaga a donné le ton de la conversation : « Comme nous le savons, la santé est un droit fondamental de la personne, mais partout au Canada, à cause des séquelles du colonialisme et du racisme systémique, les membres des Premières Nations, les Inuits et les Métis font face à des disparités inacceptables sur le plan de la santé. »
« Pour améliorer les résultats en matière de santé pour les peuples autochtones, il faut d’abord que les Autochtones eux-mêmes jouent un rôle de premier plan. »
Il s’agissait de la première séance de la série de causeries de l’AMC sur la santé des Autochtones, qui vise à rassembler des patients et patientes, des prestataires de soins de santé et des leaders autochtones dans le cadre de discussions sur la façon d’avancer ensemble vers la réconciliation.
La panéliste Denise McCuaig, directrice générale de la transformation des soins de santé et du développement des capacités auprès d’Excellence en santé Canada, a expliqué que la sécurité culturelle est définie par la personne qui reçoit le service, et non par la personne qui le prodigue.
« Une expérience culturellement sûre est une question de choix », a-t-elle dit. « [En tant que personnes autochtones], nous avons été privés de tant de choix, et d’une si grande part de nos vies… Prenons par exemple les survivants et survivantes des pensionnats autochtones : ils ne pouvaient pas choisir les vêtements qu’ils portaient, ce qu’ils mangeaient et quand ils mangeaient, la façon dont ils pouvaient exprimer leur foi ou la langue qu’ils pouvaient utiliser... Et ce n’est qu’un exemple. »
Les médecins et autres professionnels de la santé peuvent créer des environnements culturellement sûrs en confrontant leurs préjugés personnels et en écoutant les expériences des patients et patientes.
Même si le chemin vers la réconciliation dure toute une vie, le Dr Lafontaine a expliqué que la sécurité culturelle peut être mise en œuvre immédiatement pour ce qui est de « l’absence de préjudices et d’hostilité ».
« Les prestataires de soins de santé détiennent beaucoup de pouvoir, mais c’est quelque chose qui leur a été donné, sans qu’ils l’aient nécessairement gagné. La sécurité culturelle, c’est utiliser ce pouvoir pour aider les autres à obtenir ce dont ils ont besoin. C’est l’acte qui consiste à traiter la personne qui se trouve en face de vous comme un être humain, en respectant ses expériences vécues et en adoptant un comportement bienveillant, exempt d’hostilité. »
L’AMC s’est engagée à prendre des mesures concrètes pour favoriser la réconciliation dans le secteur des soins de santé et travailler sur une réforme de la santé dirigée par les Autochtones, en partenariat avec les peuples autochtones. Cette série de discussions s’inscrit dans cet engagement. Joignez-vous à nous pour les prochaines séances, le 24 mai et le 12 juin.